Calot Corniche Bernard

Le Calot est la coiffe portée par les élèves des Classes Préparatoires aux Grandes Ecoles. Depuis la IIè République, les lycées proposent des classes de "Mathématiques Spéciales", d'enseignement scientifique avancé, que ne peuvent pas proposer les Universités. Elles préparent dans un premier temps aux concours d'entrée des grandes écoles militaires (Polytechnique, Saint-Cyr) puis s'étendent aux grandes écoles d'ingénieurs (les Mines, Centrale, etc...) qui apparaissent à la fin du XIXè siècle [1]. Ces classes préparatoires vont progressivement développer leur propre folklore qui s'inspire de celui de leurs ainés : l'Ecole Polytechnique et les grandes écoles d'ingénieurs. On connait surtout les Taupins (Math-Sup), les Khagneux (Lettres) ou encore les Épiciers (HEC). Mais on y trouve également les Cornichons.

Les Cornichons sont les élèves des Corniches, ces classes préparant au concours de la Grande École Spéciale Militaire de Saint-Cyr [2] ; dont on nomme les élèves-officiers les cyrards.

BernardCe Calot se décrit ainsi : gris et rouge, à la fesse1 rouge et au liseré vert. Il a appartenu à Bernard Housset2. Il l’a obtenu alors qu’il était en Corniche de 1912 à 1914, peut-être au Lycée Hoche de Versailles3. A l’issue de sa prépa, il réussit l’écrit du concours d’entrée à Saint-Cyr en Juin 1914 [3]. Mais la situation internationale se dégrade vite et les oraux, prévus initialement pendant l’été sont annulés.

La France entre en guerre le 3 Août, et l’Etat Major décide alors de valider tous les admissibles qui sont envoyés au combat. Ils sont près de 800 [3]. Après une formation express, ils obtiennent tous le grade de sous-lieutenant le 5 décembre. 

Malgré le feu et la mitraille, la promotion est baptisée en Janvier 1915 par le Général des Garets, un officier à la retraite, président de l’association d’aide aux familles des saint-cyriens [4]. Elle obtient alors son nom : la promotion « de la Grande Revanche » en référence évidente à la guerre franco-prussienne de 1870 à laquelle avait participé le Général [3].

Bernard gagne très vite ses gallons de Capitaine, dès la seconde bataille de Champagne (1915) [5], c'est-à-dire qu’il commandait plus d’une centaine de soldats, qui s’illustrèrent en particulier dans les premiers jours de la Bataille de Verdun (1916) [6], mais également au Chemin des Dames (1917) où « bandé de la tête aux pieds, Bernard voulu rester au front et, pouvant à peine avancer, dû plusieurs fois se faire porter » [5] . Il décède d’un éclat d’obus quelques jours avant l’arrêt des combats le 2 Septembre 1918, à 23 ans [6]. A titre posthume, Bernard est fait Chevalier de la Légion d’Honneur et il a reçu à plusieurs reprises la Croix de Guerre [7].

Bernard était un « jeune capitaine doué des plus belles qualités militaires : ténacité, abnégation, habileté manoeuvrière, mène l’attaque avec intelligence, le sang froid et l’énergie d’un vrai chef. [Il était un] très brillant officier, dont la bravoure était légendaire au bataillon » peut-on lire dans ses citations militaires [8]. Ses hommes ne sont pas moins dithyrambiques à son sujet : « C’était un saint ». « Mon capitaine était pour moi un chef qu’on ne remplacera jamais. J’ai déjà vu mourir beaucoup d’officiers, mais pas un depuis le début de la guerre qui soit regretté autant que lui » [5].

Plus de la moitié de la Promotion de la Grande Revanche a péri pendant la Guerre, mais à l’issue des combats, elle doit retourner à l’école parfaire sa formation d’officier, devant écouter des instructeurs parfois moins gradés ou moins expérimentés. Et en Août 1919, c’est par ses anciens de la Promotion de la Croix du Drapeau (1913), tel que le veut la Tradition, qu’elle est à nouveau baptisée, ce qui fait de la Promotion de la Grande Revanche la seule de l’histoire de l’école à avoir subit deux baptêmes [3].

Calot Bernard Face   Housset Bernard

 

Sources : 

[1]. Bruno Belhost, La préparation aux grandes écoles scientifiques au XIXè siècle, établissements publics et institutions privées, 2001
[2]
. Général André Ranson. Petite histoire de la Corniche Hoche "1946-1967" 
[3]. Général de Brigade Jean Boÿ. Historique de la 99è promotion (1914), la promotion de la Grande Revanche. 2010.
[4]. Ludovic de Garnier des Garets. Wikipedia. [En ligne] 9 Novembre 2022. [Citation : 27 Janvier 2023.] https://fr.wikipedia.org/wiki/Ludovic_de_Garnier_des_Garets.
[5]. Charles Maurras, art. "Le million de la défense sociale", 14 Décembre 1919, L'Action Française, p. 2.
[6]. Historique du 4è bataillon de chasseurs à pieds pendant la guerre 1914-1918. impr. Berger-Levrault.
[7]. Tableau d'Honneur, Morts pour la France : guerre de 1914-1918. impr. Imprimerie française et orientale E. Bertrand.
[8]. Carte de décès de poilus. Geneawiki. [En ligne] 11 Novembre 2020. [Citation : 27 Janvier 2023.] https://fr.geneawiki.com/index.php?title=Cartes_de_d%C3%A9c%C3%A8s_de_poilus

1 Un Calot est divisé en 3 parties : le Calot, qui peut se diviser lui-même en partie haute et basse si elles sont de couleur différentes comme ici, de la fesse, qui est le dessus, généralement replié vers l'intérieur, et un liseret. La fesse s'appelle ainsi car pendant la première guerre mondiale, les soldats fabriquaient leurs bonnets à l'aide de leurs pantalons, et cette partie correspondait à la fesse du pantalon.
2 Le nom « Housset » est écrit à l’intérieur du calot, dans la doublure. Le vendeur nous a confié qu’il avait appartenu à un élève de Saint-Cyr de 1914. Après avoir consulté la liste de la Promotion de la Grande Revanche, Bernard est le seul qui porte ce patronyme.
3 Rien n'indique de près ou de loin que Bernard a fréquenté le Lycée Hoche. C'est simplement le seul lycée francilien référencé dont la Corniche était en activité à l'époque et il est né en région parisienne à Provins (77). Mais il a tout à fait pu en fréquenter une toute autre.

 

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